jeudi 7 novembre 2013

Le langage ambigu: sables mouvants du diable, par l'abbé David Hewko



«Et la lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l'ont point reçue» (St Jean I,5).

Quand le Divin Sauveur était entouré par la meute de loups des pharisiens, comme ils essayaient de le coincer dans son discours, Notre-Seigneur leur répondit: «Si je vous dis la vérité, pourquoi ne me croyez-vous pas ? ... Je vous l'ai dit et vous ne me croyez pas : les œuvres que je fais au nom de mon Père rendent témoignage de moi, mais vous ne croyez point, parce que vous n'êtes pas de mes brebis »(St Jean X,25). . Saint Paul appelle Notre-Seigneur « Gloriae Splendor : le rayonnement de la gloire du Père » (Hébreux I,3) en qui « il n'y a aucun changement, ni ombre de changement », ni confusion. Le Saint-Esprit relègue l'état de confusion aux ennemis de Dieu « qui aiment et pratiquent le mensonge» comme une punition pour avoir refusé obstinément la lumière de la vérité (Apoc. XXII,15) .

«Ambigu » désigne quelque chose qui peut être interprété de deux façons. Lorsque ce langage est utilisé dans le domaine de la foi, cela provoque une immense confusion ! Saint-Pie X dans son encyclique " Pascendi " expose la tactique du clergé moderniste qui a recours à un langage ambigu afin de présenter ses pernicieuses nouveautés. Il condamne cette ruse délibérée destinée à brouiller le sens d'une doctrine, ou pire, à conduire à la perte de la foi !

De telles tactiques déviantes ont triomphé dans tous les documents du Concile Vatican II, comme Mgr Lefebvre en a lui-même été témoin et Michael Davies le dit en les traitant de « bombes à retardement liturgiques. » Mgr Lefebvre fait référence à ceci au cours du Concile libéral lorsque le moderniste Schillebeeckx lui-même a écrit : «Nous savons très bien ce que nous faisons en plaçant des PHRASES EQUIVOQUES dans les schémas du Concile. Nous procéderons à partir de là APRES le Concile » [ Les majuscules sont de moi ]. Récemment, un archevêque moderniste, le cardinal Kasper, a témoigné de cet usage délibéré du double discours dans les documents du Concile. Il a dit: «Dans de nombreux endroits, les [ Pères conciliaires ] ont dû trouver des FORMULES DE COMPROMIS, où, souvent, les positions de la majorité sont situées immédiatement à côté de celles de la minorité, qui doivent les limiter. Ainsi, les textes conciliaires eux-mêmes ont un énorme potentiel de conflit, car ils ouvrent la porte à une réception sélective DANS LES DEUX SENS » [j'insiste par ces majuscules] .

Le langage ambigu est l'ambiance propice aux hérésies et au modernisme (« la synthèse de toutes les hérésies » - Saint-Pie X ) pour prendre racine et s'épanouir. C'est pourquoi l'Eglise catholique dans sa tradition défend vigoureusement la scolastique, la philosophie et la théologie de saint Thomas d'Aquin », et la langue immuable du latin. Pour le clergé, fidèle à la tradition, la clarté de la doctrine est cruciale dans ce combat pour la foi et rien ne peut être plus répugnant et odieux à l'esprit catholique que l'utilisation d'un langage ambigu. Il n'a pas sa place dans les écrits, les documents ou les sermons de tout catholique, en particulier des prêtres, des évêques , .... et des papes !

Saint Athanase a vu l'ensemble de la foi catholique dépendre d'une dipthongue grecque ! Tout l'avenir de la survie de la foi catholique tenu à deux lettres ! Le mot « Homoousion » signifiait : «Le Christ est de même nature que le Père» ( c'est à dire : «consubstantiel »), et l' hérétique : « Homoiousion » du prêtre Arius pouvait être interprété de deux façons différentes , catholique ou hérétique. Soit «  le Christ est de MEME substance, ou de substance SEMBLABLE A CELLE du Père. » Combien de martyrs sont morts pour défendre la vérité de la doctrine catholique claire de « homoousion » ! Les mots, comme le verre qui détient le vin, détiennent le sens des choses. Si le verre est brisé ou fissuré, le vin est perdu. De même, l'utilisation abusive des mots peut briser ou modifier le sens des mots .


Venons-en aux faits de la crise actuelle dans la Tradition. Au moment du Concile Vatican II, les libéraux ont dû inventer des échappatoires dans les documents pour rendre possible leur désir que l'Eglise se compromette et « soit acceptée » par le monde . N'est-il pas moins vrai que les esprits libéraux dans la tradition voulaient compromettre la clarté du langage afin de « devenir plus acceptables » par l'Église conciliaire ? Cela est devenue officiel en Juillet 2012 avec une toute nouvelle orientation de «normalisation» avec la Rome moderniste. Ignorant les avertissements et la direction du fondateur (qui a une grâce d'état spéciale en tant «fondateur» !) , les chefs de la Fraternité Saint-Pie X ont dû redéfinir « la conversion de Rome », faire une fausse séparation entre les «principes de prudence » et « les principes de la foi » dans l'application des questions de normalisation canonique avec la Rome moderniste, et utiliser un langage ambigu pour atteindre leurs objectifs . Pour démontrer cela, essayez de comprendre ce que certains des textes et des interviews cités ci-dessous signifient vraiment :

1 . « Beaucoup de choses que nous aurions condamnées comme issues du Concile, en fait ne sont pas issues de lui mais de la commune interprétation qu'on en a fait.... Le Concile présente une liberté religieuse qui est en fait très, très limitée. Très limitée. Dans nos pourparlers avec Rome, ils ont clairement dit que signifier qu'il y aurait un droit à l'erreur ou un droit à choisir sa religion, c'est faux ». (CNS interview du Supérieur général de mai 2012).

2 . « Au sujet du Concile, lorsqu’on m’a posé la question : « Est-ce que Vatican II appartient à la Tradition ? », j’ai répondu : « J’aimerais espérer qu’il en soit ainsi ». »

( propos du Supérieur Général, dans DICI du 6-8-12 )

3 . « La tradition est la transmission vivante de la révélation « usque ad nos » et l'Eglise dans sa doctrine, dans sa vie et dans son culte perpétue et transmet à toutes les générations ce qu'elle est et tout ce qu'elle croit. La tradition PROGRESSE dans l'Eglise avec l'assistance du Saint-Esprit, non comme une nouveauté contraire, mais grâce à une meilleure compréhension du depositum fidei.» (Préambule doctrinal, III, 3). [ majuscules idem]

4. « L’entière Tradition de la foi catholique doit être le critère et le guide de la compréhension des enseignements du Concile Vatican II, lequel à son tour éclaire – c’est-à-dire approfondit et explicite ultérieurement – certains aspects de la vie et de la doctrine de l’Eglise, implicitement présents en elle ou non encore formulés CONCEPTUELLEMENT. »
(Préambule doctrinal, III, 4). [ majuscules idem]

5. « Nous déclarons reconnaître la validité du Sacrifice de la Messe et les Sacrements ... LÉGITIMEMENT promulgués par les papes Paul VI et Jean-Paul II » (Préambule doctrinal, III, 7). [ majuscules idem] .

6. « A propos de la réponse que j'ai envoyée (...) à Rome. (...) D'après ce que je peux savoir de sources privées, j'ai l'impression que cela convient. Chez nous je pense qu'il faudra l'expliquer comme il faut, parce qu'il y a (dans ce document) des expressions ou des déclarations qui sont tellement sur la ligne de crête que si vous êtes mal tournés ou selon que vous mettez des lunettes noires ou roses, VOUS LES VOYEZ COMME CECI OU COMME CELA, donc, il faudra qu'on vous explique bien que cette lettre ne change absolument rien à notre position..., mais que si on veut la lire de travers, on arrivera à la comprendre de travers. » (Supérieur général de la FSSPX, Brignoles, mai 2012 - Nouvelles de Chrétienté n°135).


7 . « Qu’il soit noté au passage que NOUS N’AVONS PAS CHERCHE un accord pratique. Cela est faux. Nous n’avons pas refusé a priori, comme vous le demandez, de considérer l’offre du pape. Pour le bien commun de la Fraternité, nous préférerions de loin la solution actuelle de statu quo intermédiaire, mais manifestement, Rome ne le tolère plus » ( Lettre du Supérieur général et de ses deux adjoints, datée du 14 Avril 2012).
NB : Le Préambule doctrinal pour un accord pratique a été envoyé le lendemain!

Comment est-il possible que des personnes formées à réfuter le Modernisme et à dénoncer la tactique des modernistes puissent éventuellement recourir à l'utilisation de ces mêmes moyens pour atteindre leur nouvel objectif; d'être «reconnus tels que nous sommes » et d'obtenir que « justice soit faite » de peines injustes? Qu'est-il arrivé à la primauté de la foi ? Qu'est-il arrivé au « pas d'accord avant que Rome ne se convertisse à la tradition »? Qu'est-il arrivé à la preuve de Mgr Lefebvre pour savoir si le moment était venu de la conversion de Rome, à savoir la profession de tous les enseignements et des condamnations papales du Concile de Trente à « Humani Generis » de Pie XII? Quelques miettes de « reconnaissance» à certains aspects de la tradition sont loin d'être des preuves de la conversion de Rome ! « Summorum Pontificum » et la soi-disant « levée » d'excommunications qui n'ont jamais existé, ne sont que des tactiques et des « manœuvres » - c'est ainsi que Mgr Lefebvre lui-même nommait d'autres supposés changements de la part du Saint-Siège - et ne sont rien d'autre que des tentatives pour précipiter la FSSPX dans l'Église conciliaire. Encore et toujours, la preuve s'en trouve dans les conséquences qu'on observe chez toutes les communautés catholiques traditionnelles qui ont fait des accords avec Rome. La preuve en est l'inébranlable adhésion des autorités romaines à Vatican II !

Les hommes de la Tradition ont-ils oublié les paroles divines de l' unique Sauveur ; « Prends ta croix et suis-moi ? » Les défenseurs du dépôt de la foi se sont-ils lassés de cette longue bataille ?


"Quand ceux qui sont choisis pour défendre la Foi ne veulent plus porter cette croix , et choisissent d'échanger la résistance et le sacrifice de soi pour le compromis et la « reconnaissance » au nom d'une « unité utopique » , alors, qu'advient-il de la vérité ? Qu'advient-il de la seule vraie foi ? Qu'advient-il des âmes?

« Le Préambule doctrinal du 15 Avril 2012, OFFICIELLEMENT signé et soumis à Rome par les supérieurs de la Fraternité, est un témoignage de la volonté de mener la lutte pour la foi à travers des expressions explicites de l'ambiguïté. Cette ambiguïté (similaire à celle que pratiquent des francs-maçons, marranes et infiltrés de l'ennemi ) justifie la Résistance ! Les faits parlent d'eux-mêmes : depuis la déclaration du chapitre général et ses 6 conditions, la lettre de réponse aux 3 évêques (14 Avril 2012) , et le fameux Préambule doctrinal, il y a eu un affaiblissement de la doctrine, une perte des âmes et de la confusion. La crise devient plus sévère . Une clarification devient indispensable! " (Dom Daniel Joaquim Maria de Santana, FBVM ) .

" Affirmer la vérité ! " disait Monseigneur aux jeunes prêtres . Pourquoi ? Parce que, comme Mgr Williamson a l'habitude de le dire: «La vérité tient debout toute seule. » Saint-Jean l'appelle « la victoire qui triomphe du monde, c'est notre foi ! » (1 Jn V: . 4) Il ne nous appartient pas de la modifier ou de la moderniser, car elle ne provient pas de nous, mais elle est le dépôt sacré qui doit être transmis de génération en génération (« tradere » signifie « léguer », en latin, d'où le mot «tradition» est dérivé). N'est-ce pas la gloire de la Tradition catholique, qui, comme son fondateur sacré Lui-même, est toujours la même, victoire sur les démons et les hommes, sur les hérésies, et toujours belle ? «Jésus Christ, hier et aujourd'hui , et le même pour toujours! » (Hébreux XIII, 8)

«C'est sur le champ de bataille de la doctrine que les batailles sont gagnées ou perdues , et c'est ce qui décide de l'avenir », a déclaré le grand cardinal Pie de Poitiers. Si la Fraternité reprend son ancienne défense claire de la doctrine catholique, qui, à son tour, exige le rejet et la répudiation publique de la langue de compromis utilisée dans certains documents récents et interviews , alors Dieu pourra laisser la veilleuse allumée. Sinon, on poursuivra la voie du compromis vers les mâchoires ouvertes du modernisme conciliaire et de sa « reconnaissance officielle» au prix de la vérité sans ambiguïté et au prix d'âmes innombrables ! Que faire alors ? ... Notre Seigneur a dit ceci : «Je vous le dis, si eux se taisent, les pierres crieront ! " ( Saint- Luc XIX: 40. ) La foi sera conservée, même si nous serons réduits à une poignée !

Laissons au grand Mgr Lefebvre le mot de la fin au sujet des libéraux et de leur amour des mots ambigus - des sables mouvants du diable !

. . « Les libéraux catholiques n’ont cessé de répondre qu’ils ont une volonté d’orthodoxie égale à celle des plus intransigeants. La conciliation qu’ils ont cherchée n’est pas théorique mais pratique.’’ … ils en reviennent toujours à cela. Ils nous disent : ‘’vous voyez, nous sommes des pasteurs. Nous, nous sommes dans la réalité, nous sommes des gens concrets, nous sommes des gens pratiques !’’ Qu’est-ce que la pratique ? La pratique, c’est l’application des principes par la vertu de prudence, ce n’est pas autre chose. Qu’est-ce que la pratique s’il n’y a plus les principes ? … ‘’oui oui oui, nous sommes d’accord, nous avons le même Credo que vous, etc. Oui, mais quand nous sommes dans le monde alors là, il faut se mettre au niveau des autres, se mettre avec les autres, sans quoi vous ne les convertirez jamais’’. Erreur complète ! … Les papes ont senti ce danger de ces catholiques qui sont presque insaisissables parce qu’ils affirment lorsqu’on veut les saisir : ‘’Non, non, je suis d’accord’’. Mais après, ils font des pactes avec les ennemis de l’Eglise … Ce sont des traîtres … plus funestes que des ennemis déclarés … ils divisent les esprits, déchirent l’unité, affaiblissent les forces qu’il faudrait réunir toutes ensemble contre l’ennemi… On vous le dira, c’est vous qui divisez, mais on ne peut pas diviser quand on s’attache à la vérité … ceux qui divisent sont ceux qui essayent de diminuer la vérité pour s’entendre avec tout le monde… Ceux qui sont dans l’erreur doivent se convertir à la vérité et non pas essayer de trouver un terrain d’entente entre la vérité et l’erreur… » ( Mgr Lefebvre, conférence spirituelle, Ecône, janvier 1974).